Vue sur la littérature d'ici ou d'ailleurs, à la recherche de petites pépites à partager, pour ré-enchanter nos imaginaires d'avenir... Mon site web de prospective: pan-or-amiques.com
31 décembre 2019
Le dimanche des mères
Un roman pour les amateurs de Downtown Abbey: Le dimanche des mères de Graham Swift.
Nous sommes en Angleterre dans les années 1920. Jane, femme de chambre chez les Niven, a une relation avec un aristocrate qui va se marier, Paul Sheringham. C'est le dimanche des mères, le jour où les domestiques peuvent rentrer voir leur maman dans leur famille. Elle est orpheline. Que va-t-elle faire? Va-t-elle le retrouver alors qu'il est sur le point de changer de vie?
Quelle est cette relation qu'ils entretiennent depuis des années? Qui sont-ils l'un pour l'autre ?
Un roman qui interroge la fin d'un monde, le rôle de la sensualité et des liens sociaux, quand ceux-ci ne sont pas alignés avec les schémas classiques.
Ça se lit tout seul, c'est court, bien écrit.
Tout est dans les détails, les non-dits, les silences.
J'aime le format: raconter une journée, avec tous les flash-backs et autres éléments qui se greffent dans le récit.
J'apprécie aussi le personnage de Jane, avec toute sa lucidité et sa sensibilité.
Merci à Janny et à son club de lecture pour la découverte!
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Au féminin,
D'un autre siècle,
Littérature anglo-saxonne
26 décembre 2019
Le mari de mon frère
Un chouette manga à lire pendant l'hiver: Le mari de mon frère.
Yaichi élève seul sa petite fille, quand soudain un canadien débarque chez eux, et se présente comme le mari de son frère jumeaux récemment décédé. Il arrive tout droit du Canada pour découvrir un peu comment son mari a vécu son enfance au Japon.
Yaichi est très mal à l'aise d'accueillir chez lui ce beau frère homosexuel, alors qu'au contraire sa petite fille s'en fait une joie. Elle découvre avec amour qu'elle a un oncle, elle est très curieuse de découvrir comment on vit au Canada.
Kana, avec ses questions d'enfants, est très touchante et attachante.
Un manga qui prône la tolérance, l'ouverture aux autres, la découverte, la générosité.
Parfait pour les fêtes! Ca se lit tout seul.
En plus il y a des encadrés pédagogiques sur l'histoire des gays, etc.
Merci Mara pour le bon conseil!
A lire dès 7 ans...
10 novembre 2019
La mémoire des couleurs
Mauve a quinze ans. Il se réveille un jour dans une brocante. Il ne se souvient de rien. Il se demande ce qu'il fait là. Il comprend très vite qu'il peut lire dans le pensées des gens qu'ils croisent. Il se rend compte aussi qu'il n'est pas le premier jeune portant un nom de couleur à avoir atterri dans cette brocante.
Il rencontre un beau personnage, André, un homme agé qui va essayer de lui donner des clés pour grandir et se construire...
Il retrouve pas à pas d'autres couleurs, et mène une enquête sur son passé pour mieux tracer son avenir...
Stéphane Michaka nous entraîne dans ce roman à la croisée des chemins entre deux univers, celui de Circé, une planète lointaine dont viennent toutes les couleurs et la terre où les humains subissent la pollution et le changement climatique. Sur la terre, les couleurs découvrent le "Je", qui n'existe pas sur Circé, mais aussi une vie sans "l'oracle", algorithme qui rythme tout sur Circé.
C'est intéressant comme La mémoire des couleurs prend tous les sujets du moment: les migrants, l'IA, la fin de la biodiversité, pour en faire un roman jeunesse intrigant et émouvant, qui pose des questions politiques et philosophiques sur les choix que font nos sociétés actuellement.
J'ai aimé le goût des vieux objets plein de sens, l'attention au rôle que joue la lecture de romans pour sauver les humains, la question de la communauté de vie pour être plus fort ou pas ensemble face aux disruptions, pour résister.
Je trouve intéressant que le roman mette en mot ce que c'est qu'aimer quelqu'un, ce que c'est de croire ou pas en une idée, en une personne, en une réalité.
Toutefois la société que crée Stéphane Michaka ressemble trop par de nombreux aspects à ce qui est toujours mis en scène dans les romans de science fiction, à mon goût. On rentre bien dans l'histoire mais je suis restée sur ma fin quand même... Je m'attendais à mieux!
11 octobre 2019
La gouvernante suédoise
Un roman fort autour des amours secrets et des non-dits, dans une famille qui vit entre la Suède et la France au dix-neuvième et vingtième siècles! La gouvernante suédoise se lit avec fascination tant il décortique justement les silences et les mensonges du quotidien.
Hulda vient de se marier et d'avoir des enfants, lorsqu'elle et son mari quittent Stockholm et partent vivre à l'étranger. Pour les aider, Livia, jeune gouvernante francophone, se joint à eux... et un trio bien étrange s'installe. Je ne vous en dis pas plus!
Marie Sizun raconte dans cette fiction l'histoire de sa propre famille sur la base des photos et des journaux intimes ou autres lettres retrouvées. Les personnages sont touchants et complexes. Les scènes d'intérieur étouffantes sont très bien rendues. On se sent vraiment embarqué aux côtés des personnages, de leurs tourments, jour après jour, Noël après Noël. Le ton est juste, nuancé, fin et sensible. On sent le remarquable travail d'enquête qu'elle a mené pour mettre en mot son récit personnel et celui de ses parents et grand-parents.
Un roman à lire si vous aimez les vieux albums de famille, les récits d'amour secrets au coin du feu! Marie Sizun excelle dans l'intensité des descriptions de sentiments, les mains qui se frôlent, les regards plein de sous-entendus, et les gestes du quotidien qui trahissent les désirs les plus enfouis des uns ou des autres.
Un livre qui plaira aux amateurs de Downton Abbey, car on retrouve la vie d'un foyer avec des domestiques, la gouvernante, les bonnes et les ragots!
Ce livre a reçu le prix Bretagne en 2017.
Un grand merci Marie-Louise pour le conseil!
03 octobre 2019
La quête d'Ewilan
Petit découverte de la rentrée qui m'a permis de voyager au loin malgré la reprise du travail: La quête d'Ewilan de Pierre Bottero! Je viens de dévorer les deux premiers tomes, et le troisième est sur ma table de nuit!
Ewilan est une jeune ado, qui a été adoptée et dont la famille d'accueil est loin d'être chaleureuse. Un jour, elle fait "un pas de côté" et se retrouve projetée dans un monde fantastique, où des monstres horribles font la lois, les Ts'liches. Elle va peu à peu comprendre qu'elle a des pouvoirs très spéciaux, dont celui de faire apparaître pour de vrai tout ce qu'elle imagine. Elle est "dessinatrice". Grâce à Duom Nil'Erg, analyste célèbre pour sa connaissance du dessin, elle va faire la rencontre d'amis et partir en quête... pour délivrer le royaume du verrou Ts'liches et permettre à tous les habitants de reconquérir les spires de l'imagination!
J'aime beaucoup le pouvoir de conteur de Bottero, les personnages attachants qu'il glisse de page en page, l'humour des dialogues. L'univers qu'il crée est un peu à la Harry Potter, plein d'animaux et d'être étranges et touchants. Il y a les Fael, redoutables tireurs à l'arc, qui n'arrêtent pas de se moquer des humains. Il y a les chuchoteurs, à peine plus gros qu'une souris, et qui servent aux dessinateurs à communiquer. Les gommeurs, les goules, les rêveurs, et j'en passe et des meilleurs.
J'apprécie aussi que derrière ce monde fantastique, Bottero nous offre une réflexion sur ce qu'est être écrivain et avoir le pouvoir de l'imagination!
Enfin qu'il est beau de voir qu'il met en scène de belles filles et femmes fortes et solides. De vraies modèles d'intelligence, d'humanité, d'ouverture aux autres.
Un grand merci à Julia Cado pour l'excellent conseil de littérature jeunesse!
Vivement la suite des aventures!
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22 septembre 2019
La petite fille sur la banquise
C'est un livre difficile à lire, car il parle d'une petite fille de neuf ans, violée dans une cage d'escalier.
Avec cette auto-fiction, Adélaïde Bon raconte surtout comment cela va marquer toute sa vie d'adolescente et de jeune femme, son jeu d'actrice, ses liens aux autres, son rapport au corps et à la sexualité.
Pour incarner le mal être, les méduses se déploient sous sa plume et dans son quotidien. Elles peuvent tout gâcher, lui donner envie de mourir ou de se faire du mal.
Et pourtant comme elle dit, ses parents ont compris, elle a vu un médecin, la police, et elle a ensuite multiplié les démarches pour prendre soin d'elle. Mais ça n'arrêtait pas la douleur, l'angoisse, la culpabilité.
Le livre se termine par le procès du violeur, et montre aussi les rouages judiciaires, au-delà des effets psychologiques et physiques.
Le roman a une forme intéressante car elle écrit à la troisième personne, puis à la première peu à peu.
Très touchée par cette lecture, témoignage, au féminin. Merci Marion pour le cadeau!
Le livre a reçu le prix des lecteurs sélection 2019.
Un texte qui montre bien la place du travail sur soi pour avancer, l'importance de l'écoute, de la solidarité, de la famille.
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11 septembre 2019
A la ligne
Il y a des livres salvateurs. C'est ce que fut pour moi A la ligne de Joseph Ponthus la semaine dernière, entre deux stations de métro dans une ligne blindée, inhumaine.
Dans ce premier roman, un ancien khâgneux passionné de littérature y décortique les non-sens du travail, depuis son expérience d'intérimaire dans l'agro-alimentaire à faire cuire des tonnes de bulots à celle du nettoyage et autres missions hard core dans un abattoir.
Il décrit le travail, les gestes, les ambiances, les silences et les bruits, les pauses, les douleurs du corps et de l'âme, les jeux de rapport de forces. C'est à la fois sociologique, poétique, et auto-fictif! C'est bourré d'anecdotes qu'on n'oublie pas. C'est touchant, révoltant, intrigant. Tout à la fois.
Il décrit très bien "le merdique", comme l'appelle le philosophe Pascal Chabot. C'est à dire les choses usantes qui ne produisent rien mais perdurent pour le plus grand malheur de certains. Et avouons le, on n'y passe tous! Qu'il est bon de voir des humains qui ont su inventer des postures pour tenir face à lui...
C'est un livre qui permet de prendre du recul sur nos univers professionnels. Un texte qui montre comment la littérature peut permettre de survivre, de Dumas à Apollinaire, en passant par la chanson française...
La forme du livre m'a plu aussi, comme une sorte de grand poème, de petites phrases courtes, puis à la ligne, justement. On sent qu'il écrit tous les soirs après le travail, pour évacuer, pour coucher sur le papier ce qu'il a composé au fil des heures pour ne pas souffrir ou s'ennuyer. On sent le vécu, le témoignage, l'immersion, la plongée, les oscillations de l'état d'esprit, la joie d'une bonne blague, la douleur d'un petit retard dans la chaîne.
Un livre à mettre dans toutes les mains pour dénoncer les accidents du travail, la précarité, le parcours des chômeurs, la condition ouvrière. Ce n'est pas de la haine, c'est une forme de regard juste, drôle, qui s'attache à tout pour tenir, tenir à tout prix.
Un livre où l'on sent l'amour aussi à la mère, à l'épouse, aux lignes qu'on se répète comme des mantras précieux,
Alors merci Joseph Ponthus, et chapeau bas. Un livre qui donne envie d'écrire!
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08 septembre 2019
La végétarienne
Encore de la littérature coréenne, Han Kang avec La Végétarienne.
Un matin, elle se réveille après un rêve atroce, et décide de se débarrasser de toute la viande de la maison. Son mari la retrouve en train de vider le congélateur et le réfrigérateur.
Ce dernier ne comprend pas le changement qu'il observe chez sa femme et tente de la forcer à changer de comportement. Il s'allie avec se belle famille pour se faire.
C'est un livre où l'on sent une violence sourde poindre derrière chaque mot.
C'est très troublant à lire... Il y a des scènes où l'on malmène la végétarienne pour la gaver, la forcer à manger de la viande à tout prix.
Est-ce que l'auteur cherche à dénoncer la société coréenne qui force la femme mariée à subir les pressions familiales et maritales?
En tout cas, un roman qui marque par l'explication qu'il fait de la non-communication, de l'incompréhension mutuelle.
04 septembre 2019
Ma vie palpitante
Vacances en Corée du Sud oblige, je me suis penchée sur les romans coréens cet été, et tout a commencé par Ma vie palpitante de KIM Ae-ran (Merci Marie-Anaïs!)
Areum a seize ans, l'âge que ses parents avaient quand ils l'ont conçu. Pourtant il ne lui reste que peu de temps à vivre, car il est atteint d'une maladie qui le fait vieillir de dix ans en un an. Chaque jour est accompagné de la dégénérescence de sa vue, de ses muscles, et de tous les tissus qui composent son corps.
Alors il interroge son histoire et se met à écrire sur les adolescents que furent ses parents à sa naissance. Il tente de comprendre ce qu'il peut faire de sa vie, lui qui en a si peu.
Ses parents, eux, n'arrivent pas à gagner leur vie. Or les frais d’hôpitaux s'accumulent. C'est comme cela qu'ils finissent par décider de participer à une émission télé, afin que la population émue ne les aide à payer pour Areum toutes les factures médicales...
Je ne vous en dis pas plus.
Un roman sur les âges de la vie et le sens de l'existence.
Un livre qui interroge notre monde moderne, la télé réalité, les réseaux sociaux, les fausses identités, les jeux en ligne.
Un regard sur la Corée du Sud avec les tensions familiales, les attentes sociales, la pression pour la réussite scolaire et professionnelle.
Un texte à la première personne avec un héro attachant, un style qui s'attache aux détails avec singularité.
Une belle découverte !
27 août 2019
Deux femmes
Voyage en Corée du Sud oblige, je me suis penchée sur des livres du pays! Et tout d'abord la BD Deux femmes de Song Aram.
C'est l'histoire d'amitié entre deux copines, l'une qui fait le choix traditionnel de se marier et de devenir femme au foyer à s'occuper des enfants, à la coréenne. Et l'autre non.
On voit vraiment de planches en planches la condition féminine en Corée du Sud, le rôle des familles et belle-famille. Elles portent tout sur leurs épaules, le succès scolaire des petits, le ménage, etc.
Ce manhwaga respire le vécu et c'est ce qui le rend si touchant.
Un grand MERCI à BD NET Nation pour la belle découverte!
Libellés :
Au féminin,
B.D.,
Découvrir un pays,
Littérature coréenne
23 août 2019
Et soudain la liberté
Je ne connaissais pas du tout la vie d'Evelyne Pisier, mais j'ai découvert avec Et soudain la liberté, l'histoire d'une femme d'engagement, amoureuse de la vie, une femme belle et forte !
Evelyne Pisier a eu l'idée de faire un roman sur la base de sa propre expérience familiale et professionnelle. Un livre qui parlerait de sa mère, de l'amour, des amitiés, et des tournants de l'histoire.
Fille d'un pétainiste, née en Indochine, elle a suivi la révolution mentale de sa maman vers une libération de la femme, Mai 1968 et a su se construire son propre regard sur le monde et l'existence, par ses rencontres et ses lectures.
Malheureusement décédée avant d'avoir fini le texte, c'est son éditrice et amie, Caroline Laurent, qui va reprendre la plume et écrire un livre qui mélange le roman commencé d'Evelyne Pisier et son travail à elle pour faire naître un livre à paraître. Des jeux d'écho se tissent entre les vies d'Evelyne Piser et de Caroline Laurent, qui donnent sens à cette écriture à quatre mains, assez inédite.
On est tout de suite emporté par la force du témoignage. Les guerres de décolonisation s'incarnent dans le quotidien d'une famille, mais aussi la brutalité des camps de prisonniers où Evelyne Pisier et sa mère vont être enfermées.
Le vécu des femmes soumises ou libérées est présenté de pages en pages, avec des scènes très fortes de colères, de disputes et d'amour.
Le vingtième siècle se déroule sous nos yeux, à travers le regard d'une enfant, d'une adolescente déboussolée puis d'une femme.
J'ai aimé le passage par la fiction pour mieux dire la singularité du vécu, tout en ayant en parallèle le regard de l'éditrice pour décrypter ce que le roman dit de la vie "réelle" d'Evelyne Pisier.
J'ai aimé voir se succéder les combats: combat pour l'avortement, la pilule, les droits des homosexuels mais aussi le droit à mourir dans la dignité!
J'ai été fascinée par les histoires d'amour d'Evelyne et de sa mère, qui sont en plus amusantes à lire car leurs amants/amours sont des hommes célèbres, je ne vous en dit pas plus, pour ne pas vous gâcher la surprise !
C'est un livre sur le désir, les choix personnels, le poids familial, l'émancipation.
Un livre Au Féminin!
07 juillet 2019
Die Herrenausstatterin
Un petit roman en allemand (Merci Annet et Joachim!).
Mariana Leky est une auteur qui vit à Berlin et qui pour ce roman nous plonge dans la vie de Katja. Elle tombe amoureuse de son dentiste, se marie, et tout s'achève brutalement.. Tromperie, décès... bref, elle se retrouve seule chez elle et pas au mieux de sa forme.
C'est alors que deux hommes apparaissent dans sa vie. Un vieux monsieur et un jeune plombier.
On ne sait pas trop d'où ils sortent, pourquoi ils sont là... Mais ce trio va la sortir de là !
Le ton est très décalé et amusant.
L'histoire est bourré d'anecdotes joyeuses et étranges... De comment faire quand on reçoit un grand flamand rose en métal comme cadeau de mariage, à comment vivre avec un fantôme!
Je ne vous en dis pas plus.
Ça m'a un peu fait penser dans le ton et l'écriture à La journée de la vierge.
Le roman existe aussi en anglais pour ceux qui ne liraient pas l'allemand!
Un livre qui parle de deuil et de reconstruction.
Un roman sur la singularité comme beauté!
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Littérature allemande,
Out of the box,
Rapport à la mort
20 juin 2019
Unité 8200
Un petit roman d'espionnage pour changer!
L'unité 8200 est une entité de renseignement de l'armée Israélienne qui s'occupe de tout ce qui est décryptage/décodage. Un peu l'équivalent de la NSA aux Etats-Unis.
Dans ce roman, Dov Alfon nous entraîne sur 24 heures pleines de suspense, entre Paris et Tel Aviv et Macao! De mystérieux meurtres d’israéliens et de chinois se multiplient en France, tandis que les luttes inter-organisationnelles dans les services de sécurité Israéliens battent leur plein!
J'aime beaucoup l’héroïne principale, Oriana, une agent qui est très fine dans ses observations, dans l'analyse des jeux d'intimidation politiques. J'aime bien aussi le côté technologique du récit avec l'usage d'outils très spéciaux! Je trouve intéressant aussi le côté collaboration inter-service, entre les français, les américains et les israéliens.
Je trouve que le ton reste toujours un peu ironique et drôle au milieu pourtant d'épisodes dramatiques.
J'admire le côté trépidant de la construction du récit.
On se retrouve vraiment dans certains lieux de Paris, avec un sens du cadre à chaque scène.
On est tenu en haleine, on veut savoir la fin!
Merci à Christine pour la belle découverte.
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Littérature israëlienne,
Polars
15 juin 2019
Soufi, mon amour
Il y a des hasards dans la vie... Comme partir avec Soufi, mon amour à une semaine Yoga Ayurvéda et se retrouver à faire du yoga derviche, comme le derviche tourneur héros du roman!
Un magnifique livre écrit par Elif Shafak!
Après quarante ans de mariage, Ella est un peu seule, un peu dans le vide, un peu trompée par son mari, un peu mal respectée de ses enfants... Un peu tout, comme ça, l'air de rien. Elle est engagée pour relire le manuscrit d'un auteur nouveau, qui parle d'un derviche et de son lien avec le poète Rumi, au XIIe siècle. Ce livre va la transformer, et lui faire découvrir ce que veut dire vivre intensément!
Un très beau texte sur la vie, son sens, son intensité, sur le pouvoir d'être et de devenir soi-même.
Un livre sur l'amour, la spiritualité, la rencontre sous toutes ses formes.
Le roman est structuré autour des éléments: terre, eau, feu, etc.
Il alterne la vie d'un derviche errant dans les années 1240 avec celle d'Ella et de son écrivain Aziz en 2008, mais ça passe tout seul. C'est comme si tout résonnait!
Merci Anouck pour cette très belle découverte!
09 juin 2019
Le commis
Tout se passe à Brooklyn, dans une petite épicerie de quartier. Morris, juif ayant fui la Russie pour les Etats-Unis, y vit tant bien que mal, en tâchant difficilement de nourrir sa femme et sa fille. Un soir, il se fait braquer. Au comble de la malchance, le vent semble tourner quand un jeune italien se présente pour l'aider.
Bernard Malamud nous emporte dans ce quotidien de tranche de jambons à découper et de comptes à boucler... et surtout dans une sorte de pièce de théâtre qui pose la question du lien entre les deux personnages principaux, le tenancier de la boutique, Morris, et son mystérieux commis italien .
Un roman qui interroge sur le bien et le mal, sur la pardon et la rédemption. Un texte qui parle du poids des actes, des silences et des promesses.
Un livre qui pose aussi la question du sens des origines et de la foi. Qu'est-ce qu'être juif ? italien? américain?
Un récit qui marque, avec son allure de fable puissante et sensible.
Merci à Christine pour la découverte!
Un grand roman de la littérature juive américaine!
26 mai 2019
Patria
Bittori est veuve. Son mari est décédé dans un attentat de l'ETA... Au moment où les nationalistes basques décident de ne plus tuer, elle retourne vivre dans son village, celui où vit toujours Miren, son amie d'autrefois, dont le fils est devenu activiste, et surement terroriste. Elle vit alors avec les regards des villageois, les commérages, les colères. Elle vit avec les visites au cimetière, les passages de ses enfants, les appels téléphoniques.
Fernando Aramburu nous plonge en 600 pages dans l'intimité de deux familles: celle endeuillée et celle qui vit avec la prison et la culpabilité. Il montre combien la violence marque des générations après.
Ce roman interroge l'histoire de l'Espagne, la place du pardon, la place de l'oubli, la place des doutes.
J'ai beaucoup aimé le style de l'auteur, qui montre comment le quotidien est rempli de souvenirs. Souvent les personnages vivent un moment présent et en superposition des couches d'histoires, d'anecdotes, qui leur reviennent.
J'aime aussi les restes de bienveillances au milieu des douleurs.
Patria a reçu le prix national de la littérature et le prix de la critique à sa sortie.
Merci à Marie-Louise pour ce beau cadeau!
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Littérature espagnole,
Rapport à la mort
05 mai 2019
Kobane Calling
Les longs weekends de Mai sont propices à la lecture de B.D.
Découverte le 1er mai de Kobane Calling de Zero Calcare.
Nous suivons ses péripéties vers la frontière entre la Turquie et la Syrie. Il y part pour mieux comprendre le rôle des armées de femmes kurdes dans la lutte contre Daech.
Avec humour, le livre retrace tout ce que Zero Calcare a pu ressentir, depuis l'annonce de son départ à sa mère, jusqu'au fond du fond des montagnes syriennes, les tirs, et la peur.
Il se remet toujours en cause, ainsi que ses motivations à aller là-bas. Il rit de lui-même. Il met en scène ses doutes avec un ton décalé d'adolescent qui a bien du mal à devenir adulte.
Il montre le décalage aussi entre la couverture médiatique et le quotidien sur place.
Il illustre aussi l'arbitraire, la débrouille, les morts.
Un livre qui plaira à ceux qui aiment tenter de comprendre notre monde moderne et ses absurdités.
Une BD aussi pour ceux qui s'interrogent sur la guerre, les conflits asymétriques, le rôle ambigu des Etats comme la Turquie dans la lutte contre Daech.
Merci Etienne pour la découverte!
23 avril 2019
L'odyssée d'Hakim
Une BD en ce mois d'Avril!
On suit l'histoire vraie d'un réfugié Syrien, Hakim.
Fabien Toulmé s'interroge sur le fait que suite à deux accidents, le crash d'un avion et la disparition en mer d'un bateau plein de migrants, la presse et le ressenti aillent avant tout vers le sort des passagers aériens. Il se rend compte que c'est surement par manque de connaissances de la vie et de l'histoire des migrants.
Pour y remédier, il demande à apprendre à comprendre leur sort et rencontre ainsi Hakim.
Hakim est touchant car il avait une vie normale, à tenir une pépinière dans la banlieue de Damas. Rien ne présageait que tout allait se chambouler dans son existence au point de devoir fuir de pays en pays. C'est la banalité de l'effondrement que décortique bien le récit et aussi la quête que cela entraîne, de villes en villes...
Le trait est simple et doux. Les personnages attachants. Les situations révoltantes et kafkaïennes.
Je trouve que la BD montre bien la précarité, le fait de devoir vivre chez des autres, dépendre d'eux pour tout. La culpabilité de ne pas pouvoir travailler. La peur de ne jamais pouvoir rentrer au pays. Et l'espoir qui aide à tenir.
Une belle découverte à partager sans modération!
Un sujet social et politique traité avec justesse!
14 avril 2019
Le monde dans la main
Un roman jeunesse de Mikael Ollivier: Le monde dans la main!
Pierre est un brillant lycéen qui fait aussi le conservatoire en piano. Un jour, sur le parking d'Ikéa, sa mère disparaît... et sa vie bascule. Tout glisse vers la découverte de secrets de famille, la révélation de personnalités fortes ou faibles, le début d'une remise en cause des évidences du quotidien.
Construit sous la forme de chapitres de quelques pages, qui portent chacun un titre, le roman se lit tout seul.
Un livre sur la vie dans toutes ses dimensions, bonnes et heureuses surprises, et comment on peut grandir à travers elles.
Un roman centré sur la famille et le rôle qu'elle joue dans la construction de soi.
Un texte sur la disparition, l'absence et le deuil.
Un roman d'émancipation à sa façon.
Un livre qui a reçu le prix des collégiens de l'Hérault en 2012.
Merci à la librairie L'attrappe-coeurs dans le 15e pour ce conseil de lecture!
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31 mars 2019
La tresse
Pas un grand livre, mais un petit roman bien construit autour de trois figures de femmes.
Tout commence en Inde, où Smita est une intouchable qui décide que sa fille n'aura pas le même destin qu'elle...
Et tout continue avec Giulia en Sicile qui travaille comme ouvrière dans l'usine de son père, qui fait des perruques à la base de vrais cheveux... mais sa vie tourne au cauchemar quand elle découvre que l'entreprise familiale traditionnelle est au bord du gouffre économiquement.
Et tout enchaîne avec Sarah, partner d'un grand cabinet d'avocat canadien, et qui découvre qu'elle a un cancer.
Et les chapitres s’enchaînent en passant d'une héroïne à l'autre, d'une épreuve à l'autre.
Pas à pas on voit apparaître des liens, entre les trois histoires.
Trois âges de la vie, trois situations, trois continents, et derrière le combat de femmes pour leur vie, leur liberté, leur rêve.
Ça se lit tout seule.
A conseiller pour un petit trajet de train!
23 mars 2019
La papeterie Tsubaki
Un roman japonais, La papeterie Tusbaki de OGAWA Ito.
C'est d'abord la lenteur des mots et du rythme des journées. Nous suivons une jeune femme qui tient une papeterie, dans le détail régulier de la vie de la boutique. On prend plaisir aux gestes simples, au nettoyage du matin, au thé avec certains clients, etc.
Mais plus que de tenir une papeterie, l'héroïne du roman est écrivain publique. Elle aide les personnes à écrire des lettres, lettres de rupture, lettres d'amour, lettres de condoléance, ce sont tous les moments clé de l'existence qui y passent.
J'aime que tout soit dans le choix des mots, du type de papier, de calligraphie, d'encre, de timbres. Tout ce que nous ne prenons plus vraiment le temps de faire en fait, et qui rend la vie si belle! Aligner la pensée avec la fabrication d'un petit objet quotidien, qui doit en tout refléter ce qu'on est et qu'on pense: la lettre!
Bref, je me suis régalée.
On apprend aussi beaucoup sur le Japon, les rituels, les fêtes, les formes de politesse,...
Un roman pour ceux qui cherchent du calme et de la douceur.
Un roman qui parle d'attention à l'autre, d'amour du travail bien fait.
L'objet du livre est beau aussi, car il abrite les lettres en japonais à l'intérieur et que la couverture fait du bien rien qu'à regarder!
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02 mars 2019
L'enfant noir
De Camara Laye, guinéen, L'enfant noir semble un grand classique de la littérature francophone d'Afrique. Très autobiographique, on y suit l'enfance et l'adolescence d'un jeune africain.
Tout d'abord ses parents et le fameux génie de son père, un serpent noir qui apparaît un jour à l'enfant. Le travail des métaux à la forge paternelle, et surtout de l'or, qui demande tout un rituel avec griots.
Des nuits dans la case de sa mère.
Bref la douceur de la vie au village.
Puis le départ pour l'école puis pour l'aventure loin du pays. Les premiers amours.
C'est à la fois la description du quotidien dans un village dans les années 1930 et celui du merveilleux, de l'enchantement, de l'exotique. On sent que l'auteur fait renaître devant nos yeux chacun de ses souvenirs, des odeurs, des goûts, de sa tendre enfance. La nostalgie n'est pas loin.
C'est aussi l'histoire d'une émancipation, du devenir adulte, avec des rituels qui font peurs, par étape, dont celui de la circoncision.
Le style est simple, précis, vivant. Chaque chapitre aborde un moment clé, un épisode marquant.
Un petit roman poche, à glisser dans son sac avant de partir en Afrique...
Merci à Hélène D. pour le conseil!
23 février 2019
Libéria
Voilà un beau roman à lire en parcourant l'Afrique de l'Ouest: Liberia de Christophe Naigeon.
Nous sommes au début du 19e siècle aux Etats-Unis, dans le Massachusetts. Nous faisons la connaissance du héros, Julius Washington, un apprenti journaliste, qui fait ses armes en couvrant tout ce qui se passe au port. Il est fils d'une ancienne esclave, et il va pas à pas découvrir le monde des marins, de la traite des noirs, des abolitionnistes, des marchands, des aventuriers, et de la politique anglaise, française et américaine de l'époque.
On découvre le monde des quakers et des trafiquants en tout genre. La vie à bord, les débarquements, les déceptions, les rêves, au fil de ses traversées de l'Atlantique.
On apprend beaucoup sur les arguments en faveur et contre l'abolition de l'esclavage de l'époque. On voit aussi comment le retour des africains est tenté avec le Sierra Leone et le Libéria mais aussi avec des colonies ratées. On comprend aussi ceux qui ne veulent pas que les affranchis repartent pour qu'ils soient plus forts aux Etats-Unis.
On est plongé dans l'ambiance des vies que tout efface en une fièvre, des vies que tout détruit en un coup du sort.
Enorme travaille de documentation de l'auteur, dont on sent la plume de journaliste, qui va dans le détail, creuse, questionne.
Merci à Mme Lafon pour la très belle découverte!
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06 février 2019
Mathieu Hidalf, le génie de la bêtise
Gros coup de cœur pour Mathieu Hidalf, le génie de la bêtise, de Christophe Mauri. Quelle espièglerie, quelle facétie, quel regard piquant sur notre monde moderne plein des scoops de presse, de phénomène de cours et de contrats tordus!
Bon, je dois l'avouer, je suis conquise par ce petit jeune homme ingénieux et par le ton drôlissime de Christophe Mauri. Je ris toute seule de page en page, et j'en redemande! (J'enchaine les tomes...)
Nous sommes dans un royaume. Deux familles s'affrontent les Hidalf et les Pompou. Il faut plaire au roi... mais voilà, Mathieu Hidalf a offert au souverain pour son anniversaire un chapeau orgueilleux, qui ne veut plus quitter la tête couronnée tant il se sent vexé! Autant vous dire, que M. Hidalf regorge d'effort pour faire répéter l'hymne anti-Pompou à ses enfants et pour éviter que Mathieu, le génie de la bêtise, ne soit interviewé par le journal du royaume... Assez, c'est assez!
Tout m'a plu. Le fait que Mathieu ait trois sœurs, qui s'appellent toutes les trois Juliette pour éviter à M. Hidalf de se tromper, au chien à quatre têtes Bougetou... (dont certaines ronflent la nuit ou gobent des nymphettes, petites fées qui font la lumière dans les manoirs du royaume!).
J'aime beaucoup aussi le personnage de l'expert juridique, Maitre Magimel, qui vit avec la famille et contractualise à tout va les punitions du père, et les autres lubies du moment!
A mettre dans toutes les mains de 7 à 77 ans, pour un peu de légèreté!
Dans le tome suivant, on découvre une école pour l'élite du royaume qui pourrait être une parodie d'ENA ou un clin d’œil à Harry Potter...
Je ne vous en dis pas plus!
On sent que Christophe Mauri aime autant les contes pour enfants que les clins d’œil aux adultes.
C'est un peu comme si le prince des mots tordus et la sorcière de la rue mouffetard avaient fait des petits... On retombe en enfance avec plaisir et malice en lisant les aventures de Mathieu Hidalf!
Un petit extrait pour vous mettre en appétit:
"à la minute même où il était devenu célèbre, Mathieu avait reçu la punition la plus terrible jamais infligée à un enfant. C’est du moins ce qu’imaginait son père, M. Rigor Hidalf, qui n’avait aucune imagination.
Par exemple, allez savoir pourquoi, M. Hidalf décidait de priver Mathieu de tarte au citron, sans se souvenir qu’il détestait ça. Une autre fois, il lui faisait servir une double ration de crème de marrons, persuadé que Mathieu en avait horreur; mais c’était justement son dessert préféré!
Alors Mathieu engloutissait ses deux portions de crème de marrons. Avec un peu de chance, se disait- il, M. Hidalf le forcerait à en manger une coupe supplémentaire. Hélas ! Mme Hidalf veillait sur lui.
– Trois coupes de crème de marrons? disait-elle en posant sur Mathieu un regard pénétrant.
– Je l’ai bien mérité, maman ! Après tout, j’ai fait une grosse bêtise...
– SI J’ENTENDS ENCORE UNE FOIS CE MOT, rugit M. Hidalf, TU MANGERAS DE LA CRÈME DE MARRONS À TOUS LES DESSERTS !
– Il me semble qu’il en a mangé suffisamment pour aujourd’hui, répliqua Mme Hidalf avec un grand calme. Mathieu, les Juliette, montez vous coucher. Il est déjà tard."
30 janvier 2019
Génération K
Et voilà les trois tomes engloutis de Génération K de Marine Carteron!
Je vous avais déjà parlé d'elle en lisant Les autodafeurs.
Cette fois-ci nous suivons Kassandre, Goerges et Mina. Trois jeunes.
Kassandre est la fille d'un patron d'une grosse entreprise pharmaceutique. Elle aime le métal, s'habille en gothique et hait ses parents. Elle est en pleine crise d'adolescence.
Mina est sa meilleure amie et la fille de la femme à tout faire de la maison de ses parents. Elle est plutôt réservée. Elles sont dans la même classe.
Georges, lui, est en prison. Il est d'un milieu social défavorisé, passe son temps à faire des mauvais coups. Il se veut un gros dur qui terrorise tout le monde.
Ils vont découvrir qu'ils sont tous les trois porteurs dans leur ADN d'un gène K qui fait l'objet de convoitise... Ils vont devoir s'allier pour lutter...
Un roman jeunesse qui mêle de nombreuses tendances prospectives: le transhumanisme, l'antibiorésistance, les fake news et la théorie du complot, le changement climatique, etc.
C'est à la fois un roman de science fiction, un thriller, un roman d'émancipation.
En effet, Kassandre, Mina et Georges ont des super-pouvoirs qui se développent en grandissant ! Mais je ne vous en dis pas plus!
Ainsi Marine Carteron interroge le lien à la nature, à la vérité, à la filiation; à la maladie et à la mémoire.
Chacun des héros nous parle à la première personne, avec différents prismes qui nous donnent à voir l'évolution de l'histoire en train de se faire.
Les passages les plus intéressants sont ceux sur l'individu fasce à ses choix et à la solidarité.
Les passages les plus émouvants sont ceux où les personnages se découvrent, dans leur force et leur faiblesse, dans la lumière et la noirceur.
Un roman jeunesse assez noir, violent et sombre et pourtant plein d'espoir.
De nombreuses références à Dracula, et d'autres mythes, mais aussi à la culture pop des super héros, avec un côté décalé et ironique quand même.
Je trouve intéressant de voir le type de super pouvoir que Marine Carteron a donné à ses personnages: le pouvoir de révéler en l'autre ses peurs enfouis, le pouvoir de prendre le contrôle sur la volonté des animaux.
Merci à la librairie du Lieu Unique à Nantes pour le conseil!
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26 janvier 2019
Une histoire de sorcière
Découverte de La puissance invaincue des femmes de Mona Chollet pendant les fêtes! Elle y décrit la figure de la sorcière, à travers différentes facettes: celle de la femme indépendante, celle de la stérilité, de la vieille peau, bref à travers des angles souvent rejetés socialement du féminin: l'autonomie, la vieillesse, la femme qui n'enfante pas. Elle déconstruit aussi nos croyances sur la figure de la sorcière: ce n'était pas seulement l'église qui les pourchassait, ce n'était pas que des femmes qui étaient condamnées, etc.
Et du coup, Mona Chollet m'a donné une folle envie de me replonger dans des histoires de sorcières. Je connais par cœur les contes de Pierre Gripari (sorcière de la rue Mouffetard, Sorcière du placard aux balais) , alors je me suis plongée pour la première fois dans Maria Gripe, une auteur suédoise.
Je m'en viens donc vous conseiller Le château des enfants volés de Maria Gripe (à partir de 8 ans), oeuvre citée par Mona Chollet dans l'introduction de son livre.
Sophie et Albert vive dans une petite maison toute simple. Albert est souffleur de verre et Sophie s'occupe de leurs deux enfants, Clara et Crystal. Non loin de là, sous un pommier vit la sorcière Floppy Le Redoux.
Un jour, les deux enfants disparaissent à la foire, et Floppy va aider les deux parents désemparés à les retrouver.
J'aime beaucoup la figure de Floppy. Elle vit seule recluse à tisser des tapis, qui dans les motifs anticipent les changements du monde. Elle a un corbeau qui sort des phrases sages à la limite du compréhensibles. Elle est juste et puissante.
Je trouve le récit très proche du conte, très psychanalytique, sur ce qu'est le désir, la vie, la transmission, la parole, l'image, le poids des mots et des rêves.
Un roman qui plaira aux femmes qui veulent transmettre de la force à leurs filles!
Un conte qui se lit à voix haute aux petits et aux grands, un chapitre par soir!
Merci Emilie pour le beau cadeau que fut le livre de Mona Chollet!
Un petit extrait pour la route::
"Les gens l'avaient surnommée Floppy, car elle sortait toujours enveloppée dans une ample cape bleu, foncé, dont le large col, claquant au vent, faisait flop flop autour de sa tête. Ses bords souples étaient parsemés de fleurs retombant d'une haute calotte violette, garnie de papillons. Quant au nom de Le Redoux, il provenait simplement du fait que l'apparition de Floppy coïncidait avec le dégel. En effet, jamais elle ne sortait l'hiver. (...) Floppy était un personnage très bizarre. Elle savait prédire l'avenir. Dédaignant les cartes, elle lisait dans les lignes de la main ou scrutait le marc de café."
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Sorcières
06 janvier 2019
François, portrait d'un absent
Au décès de sa mère, Roland Barthes avait cherché le neutre, sous toutes ses formes, jusqu'à en faire un cours au Collège de France, que j'ai eu un immense plaisir à écouter il y a des années en MP3. Michael Ferrier, à la mort de François, a cherché le blanc, celui du deuil, des paysages de neige, des trous de mémoire qui se comblent. Un blanc très multiple, très profond, et très fuyant.
François meurt avec sa fille, Bahia, en mer, un tout début janvier. Et c'est la douleur et les mots pour tenir qui ont suivi pour Michael Ferrier que ces 235 pages.
François, portrait d'un absent est un livre plein de souvenirs à deux, un livre riche de fulgurances, comme autant de bons mots qui percent dans la nuit, quand on n'arrive plus à dormir. C'est un livre qui donne envie de faire attention aux détails, qui donne envie d'érudition, de bons alcools et de joies partagées.
C'est un portrait précis, comme semblait l'être François, qui connaissait si bien les différentes particularités d'interprétations de certains artistes comme ceux de jazz ou de musique classique. J'ai aimé apprendre le petit geste de la main de Leonhardt en fin de morceau au clavecin comme pour faire durer le silence magique qui clôt l'interprétation. Je trouve qu'on sent de ce silence-là dans les mots de Michael Ferrier.
C'est un livre qui donne envie de se replonger dans Montaigne ou de revoir les grands classiques au cinéma. C'est un texte qui donne aussi une forte envie de découvrir les documentaires de François, et pour ma part, j'espère trouver bien vite ceux sur le Sénégal.
Moi qui est fait mon hypokhâgne et ma khâgne à Lakanal, j'y ai été si surprise d'y retrouver des images de là-bas - Michael et François y ont fait leur prépa littéraire eux aussi. Mais à l'inverse d'eux, je n'avais jamais fait attention aux types d'arbres qui étaient dans le parc. Cela me donne envie d'y retourner que pour ça. J'aimerais aussi voir un Liquidambar un jour pour de vrai, arbre qui a été plantée en souvenir de Bahia...
Il y a de nombreuses pages qu'on n’oublie pas, dont la 144 qui reprend des principes d'errance en ville que j'aimerais bien un jour tester.
"Straight, no chaser", c'est aussi ce qui caractérise la plume de Michael Ferrier ici. La vie à l'état pur.
J'aurais aimé trouver à la fin la filmographie de François ou encore une liste des meilleurs ouvrages/films que François et Michaël ont vu ensemble, un peu comme à la fin de la BD Les Ignorants avec la liste des BD et vins partagés. A ajouter pour une prochaine édition!
Un grand merci à Christine pour le conseil de lecture!
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01 janvier 2019
Le lambeau
Un roman qui m'a fait penser à l'Ecriture ou la Vie de J. Semprum. Le même geste d'écrire pour survivre, la même place de la littérature et des vers pour tenir au milieu de l'horreur. Le même goût des tisanes froides, tant on oublie de les boire à temps à la lecture!
Le lambeau de Philippe Lançon raconte comment sa vie bascule à Charlie Hebdo lors de l'attentat. Comment il y survit et comment il finit par vivre.
C'est un texte magistral, une plume acérée, un regard sur lui sans complaisance ou presque.
Beaucoup de tableaux ou de scénettes qu'il abrite sont inoubliables. Comme la réponse aux mots fléchés, qu'il trouve pour aider les infirmières en salle de réveil... Comme le yaourt qu'il va pouvoir manger, après des mois sans alimentation par la bouche...
Les liens avec le corps médical sont aussi très habillement décrits, ainsi qu'avec son frère, ses parents, ses amis, son amoureuse.
Un livre qui rappelle les moments à l’hôpital, les moments de douleurs, les cauchemars.... et qui brille de sa singularité dans l'universel de la souffrance.
Un texte qu'on ne quitte pas, qui habite, qu'on lit d'une traite ou presque, parfois les larmes aux yeux... et pourtant sans voyeurisme.
Il a eu le Prix Femina, le prix spécial du Jury Renaudot.
Un livre pour lequel écrire une critique fait qu'on se sent tout pataud et tout bête.
Un texte qui plaira aux amoureux de littérature, d'art et de cinéma.
Un livre pour apprivoiser la mal, la douleur, la fin et les débuts.
Une belle façon de passer le 1er de l'an...
Avec tous mes vœux pour 2019, et surtout celui que vous gouttiez à des pages inoubliables, que vous sautiez d'un livre fort à un autre livre intense, que vous retombiez sur des mots oubliés, que vous en inventiez d'autres!
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