27 septembre 2006

Cosy...

J'avais promis de reparler d'Alexander Mc Call Smith, et de son Ecosse bien aimée! Voici donc aujourd'hui quelques mots sur une autre de ses séries de romans qui commence par Le Club des Philosophes Amateurs (soit en version originale: The Sunday Philosophy Club), puis qui continue avec Amis, Amants, Chocolat (soit Friends, Lovers, Chocolate).

Isabel Dalhousie, philosophe en charge de la publication de la Revue d'Ethique Appliquée, se trouve comme par hasard toujours mêlée à des morts suspectes, et bien sûr son penchant pour les cas de conscience, l'étude du bien et du mal, mais aussi sa curiosité illimitée, l'amène à enquêter dans le petit monde bien pensant d'Edinbourg. Auprès d'elle, on retrouve sa nièce Cat, qui tient une épicerie fine, avec des bons petits thés, cafés, chocolats, et autres huiles d'olive ou fromages italiens!

Petits romans "cosy", bien agréable à lire en picorant!

A déguster sans modération!


26 septembre 2006

Panoramusical!

J'ai eu l'envie de lire pour la première fois du Pascal Quignard! Vous connaissez peut-être, car c'est lui qui a écrit Tous les matins du monde, immortalisé ensuite à l'écran par un bien joli film!Ne sachant trop par quel bout entrer dans cet univers, j'ai commencé par le dernier de ses romans: Villa Amalia, que je viens tout juste de finir...





J'ai beaucoup aimé le début. Dans un style très musical ("toute l'atmosphère se tendait de nouveau comme une corde de violon sur la touche") et elliptique (usage de quelques mots entre parenthèses pour nous faire humer ce que dégustent les personnages dans un petit restau, ou tout simplement pour indiquer les motifs du papier peint au mur!), Pascale Quignard nous invite à suivre une jeune femme qui décide de tout quitter et de se construire une vie nouvelle. Elle vend sa maison, ses meubles, change de vêtement, se coupe les cheveux, jusqu'à se perdre un peu peut-être, et part en Italie. Là, elle tombe sous le charme d'une vieille villa où elle refait peu à peu sa vie.

C'est le fameux mythe de la vita nuova... l'idée qui peut parfois nous traverser l'esprit de tout quitter, de partir ailleurs, de tout laisser, de disparaître, de changer, réécrit ici tout en musique et en intensité.

"Tous les amants ont peur. Elle avait terriblement peur de ne pas convenir à la maison. Elle eut peur de ne pas savoir s’y prendre en lançant les travaux. Peur d’en altérer la force. Peur de rompre la force. Peur aussi d’être déçue. Peur de ne pas être aussi heureuse qu’elle pensait qu’elle allait l’être quand elle avait découvert la villa pour la première fois.Le printemps balaya la peur.Ce furent les grands jasmins sauvages. Ce furent les buissons de roses. Ce furent les anémones sans nombre, aux couleurs si profondes, aux beautés de soie. Ce furent les pavots."

25 septembre 2006

D'un silence à l'autre

Ce week-end, j'ai lu Apprendre à finir de Laurent Mauvignier. Découverte d'un style méticuleux, opératoire, sonore. Dans le silence d'une femme trompée, tous les petits gestes du quotidien prennent sens: prendre l'ascenseur, mettre un bouquet de fleur dans un vase, faire le lit.





Laurant Mauvignier est publié aux Editions de Minuit, et bien sûr la couverture m'a fait penser à un autre silence: Le silence de la mer, premier livre des Editions de Minuit. Je me souviens avoir aimé ce livre, il y a longtemps. Et je me rappelle encore mieux avoir lu peu après La bataille du silence... Ce livre raconte la création des Editions de minuit par Jean Bruller, alias Vercors, dans les années 1940. Vercors y raconte lui-même sa double vie: vie d'écrivain sous le nom de Vercors, vie d'éditeur caché dans la nuit sous un autre nom. Même sa femme qui avait lu et aimé Le silence de la mer ne savait pas que c'était de lui. Il raconte le transport des livres en cachette à vélo en plein Paris. Il décrit les côtes à monter au nez des allemands. Bien sûr pas question de montrer que c'est difficile, que le vélo est lourd, chargé! Il parle de la difficulté de retomber dans la vie normale, où tout le monde redevient juste son nom, sans cette force de la solidarité anonyme ou pseudonyme de la résistance.

Précieux héritages donc que ces Editions de minuit!

Enfin, pour revenir à Apprendre à finir, un clin d'oeil: Laurent Mauvignier parle de "pépites" et je me suis dit que ce serait chouette de trouver les écrivains qui donnent de belles définitions du mot "panorama" ou "pépite". Déjà un de trouver! Si vous en croisez d'autres, faites-moi signe!

"et alors je cherchais les signes, je taillais à vif dans les souvenirs, dans la mémoire je faisais des trous, je creusais et j'aurais voulu trouver comme des pépites des mots qui aurait depuis longtemps porter le germe: son abandon de moi"



22 septembre 2006

Littérature de sac à main!

Et oui, la fin des vacances, la reprise du travail, la rentrée, et la rengaine: "J'ai plus le temps de lire." A tous ceux dont cette petite phrase a traversé l'esprit, je voudrais parler d'un remède miracle: ces petits livres de poches qu'on peut glisser dans son sac à main (ou ailleurs!) et sortir à l'arrêt du bus, entre deux stations de métro, en salle d'attente, en faisant la queue, etc.





Petit inventaire à la Prévert:

- Les fables de Lafontaine: chacune d'elles est un petit univers à soi. Elles sont tour à tour drôles, satyriques, ironiques. Tout est dans le mot choisi, la réplique, la surprise. Et en prime, une petite leçon de vie!

- La première gorgée de bière de P. Delerm: petits textes d'une ou deux pages sur les petits plaisirs quotidiens. Par exemple: le premier jour où l'on peut manger de nouveau dehors, la sortie de la boulangerie avec la pyramide en papier qui cache les gâteaux du dimanche, le moment où la salle devient noir au cinéma juste avant le film, etc. Un petit délice!

- Exercices de style, de R. Queneau: C'est toujours la même petite histoire banale d'un type dans un bus, mais racontée de 99 façons différentes! C'est très ludique!

- Paroles de J. Prévert: Ca vous donnera la clé de l'expression "inventaire à la Prévert", mais au-delà de ça, c'est poétique, touchant, drôlatique. On peut y piocher ce qu'on veut selon l'humeur!

On peut toujours trouver le moyen de glisser un peu de littérature dans sa vie!

Rêver d'une place ailleurs...

Littérature d'ici ou d'ailleurs: aujourd'hui littérature allemande!

Qu'il est doux de s'endormir le soir après quelques pages lues en allemand, ça berce, ça apaise, ça emporte. Et parmi mes plus belles découvertes, il y a Judith Hermann, aujourd'hui traduite en français: Rien que des fantômes (Nichts als Gespenster) et Maison d'été, plus tard (Sommerhaus, später).

Ses livres sont des recueils de nouvelles, pleines de mélancolie et de sensibilité, sur ce que rêver d'un ailleurs apporte.



Y repenser, c'est comme réouvrir un vieil album de photo. Sur l'une d'elles, je vois un couple perdu au fin fond du désert du Nevada. Ils sont assis dans un pub à côté d'un homme du coin, qui leur sourit. L'homme a ce sourire de celui qui vient d'acheter pour la première fois des baskets format bébé, si petite, si mignonne, si fragile. Eux, ils sont surpris, ils écoutent. Un jour ils montreront la photo à leur enfant, un jour peut-être...

Et puis il y a cette photo d'un bleu soutenu, glacial, une photo d'Islande. Judith Hermann la fait voyager par courrier, la fait changer la vie d'un couple, lui fait prendre sens.

Toutes ces photos sont des panoramas tronqués où l'on ne peut que deviner les manques. La lumière y est toujours fragile, fugace.

Derrière toutes ces photos, on retrouve en négatif la solitude, la nostalgie, les voyages et les rêves ou illusions qu'ils construisent, les petits mots du quotidien pour dire l'impossible.

... Et en fond sonore, les dédicaces de Judith Hermann:

"Wouldn't it be nice

If we could live here

Make this the kind of place

where we belong"

"The doctor says, I'll be alright

But I'm feelin blue"

Tom Waits

20 septembre 2006

Voir leur monde

Cet été, j'ai lu un roman surprenant: Tout est illuminé de Jonathan Safran Foer. Sûrement un des auteurs les plus créatifs et déjantés du moment! Il suffit d'aller voir son site internet pour comprendre.

Tout est illuminé est à la fois étrange, polyphonique, et tortueux. Avec tous les frottements, toutes les rencontres, tous les chocs, quelques étincelles se produisent parfois en bas d'une page et on en reste bouche bée. Du coup, lors de cette rentrée littéraire, j'ai eu la curiosité de lire le dernier roman de sa femme: L'histoire de l'amour, de Nicole Krauss.

Et c'est étonnant à quel point son univers est proche de celui de son amour! Les mêmes croisements, les mêmes folies, les mêmes peurs, les mêmes souvenirs, la même culture juive, les mêmes mystères, etc. Même la construction de son roman, le mélange des formes, ou encore la mise en page hors du commun rappellent Tout est illuminé. A n'en pas douter, ces deux-là partagent la même vision panoramique du monde!

Finalement tous les deux répondent à la même question: comment faire l'opposé de disparaître?

Alors trois indices pour vous glisser dans L'histoire de l'amour:

- Un coeur
- Un livre ouvert
- Une boussole

A vous de résoudre l'énigme en Pologne, Russie, Italie, Chili, Etats-Unis ou ailleurs!



N.B. : Je lis les romans dans leur version originale, c'est à dire pour Jonathan Safran Foer, Nicole Krauss, mais aussi Alexander McCall Smith cité précédemment, en anglais. J'espère que les traductions françaises gardent intactes toutes ces merveilleuses impressions de lecture. Sinon, je ne peux que trop vous conseillez les versions originales: Everything is illuminated, The History of Love, The Number One Ladies Detective Agency, Tears of the Giraffe, etc.

19 septembre 2006

Le secret de nos jardins

Aujourd'hui, vue sur un grand jardin, qui se dégage derrière des portes vitrées toutes propres. Mais ce jardin a ses mystères, et il enferme un secret: une piscine, enfouie sous la terre et la pelouse bien tondue. Cette piscine au coeur d'un drame familial est à l'image du dernier roman d' Alice Ferney, Les Autres. Un roman où l'on découvre que l'on ne se connaît jamais vraiment soi-même, sauf à travers le regard de l'Autre qui ne nous connaît pas et reste pour nous un mystère!



Combien de trésors ou d'horreurs enfouis au plus profond, et qu'aucune vue panoramique ne révèle... à moins de se prêter, comme les personnages du roman, à un jeu terrible: caractère.

Il s'agit de répondre chacun son tour à une question du genre: qui parmi les joueurs est le plus attaché à l'argent? Qui n'est pas capable de mentir? etc. Puis de suivre Alice Ferney dans son subtile exercice de style. Le roman est en effet composé de trois parties: choses pensées, choses dites, choses rapportées. Dans la première, on entre tour à tour dans la tête des différents personnages. Dans la seconde, on peut lire le dialogue de la soirée, dans la troisième on découvre ce qu'on en a dit. Un jeu de miroir entre trois niveaux de vie avec lesquels nous jouons sans cesse: notre monologue intérieur, notre discours, ce qu'on peut en dire.

Déjà Alice Ferney avait frappé juste avec La conversation amoureuse, et avait prouvé que sa sensibilité lui permettait de reconstruire nos décors intérieurs. Elle nous surprend encore avec ce roman en triple écho, une belle découverte de cette rentrée littéraire!

18 septembre 2006

Mines de rien...




Aujourd'hui, je vais vous parler de mines... Pas de celles de mes crayons, car le blog est l'absence même de crayons! J'aurais pu vous parler de mines d'or, car ne l'oublions-pas, nous cherchons des pépites à partager! Mais ce sera plutôt des mines d'autres métaux et minéraux... puisque nous parlons des mines du Botswana, théâtre des romans d' Alexander McCall Smith. Mais nous parlons aussi des mines déconfites des femmes africaines, qui viennent consulter Mma Ramotswe, la plus célèbre détective du pays. Toutes les occasions sont bonnes: le mari envouté par les mauvais esprits, le fils disparu au milieu des giraffes,...

Alors asseyez-vous à l'ombre, prenez un bon petit thé, et contempler l'Afrique. Paysages poussièreux, peuplés d'humains d'une extrème politesse, d'une juste pudeur, et d'un esprit riche des esprits qui l'entoure.


Alexander McCall Smith décrit à merveille les ambiances du pays, lui qui a vécu en partie de part ces contrées, avant de ne regagner son Ecosse bien aimée, nous aurons l'occasion d'en reparler, c'est promis! Son écriture est très simple, douce et délicate. Ses personnages sont attachants, si bien qu'une fois la série commencée, on se jette sur la suite des aventures de la première agence de détective féminine du pays! Chaque cas à résoudre soulève des questions d'éthique, des pierres chaudes qui abritent parfois des serpents. Mais ne vous inquietez-pas si vous vous perdez en route, Mma et son cher garagiste réparent avec une façon bien à eux tout ceux qui passent la ligne de leur horizon.


Bonne lecture, bon voyage!

17 septembre 2006

panORamiques première! Partons vite et rentrons tard!

Aujourd'hui, vue sur un petit univers plein d'humanité, de chaleur, de quêtes et de vie: celui de Fred Vargas et de ses polars (aux éditions Viviane Hamy ou J'ai lu).




Pourquoi? D'abord, parce que tout n'est pas aussi rationnel que le plan de la cathédrale de Strasbourg, ensuite parce que tout n'est pas aussi brumeux qu'un paysage breton, enfin parce que nous devons tous peu à peu apprivoiser nos paradoxes, et cela sous toutes les latitudes...

Comment? Suivre le commissaire Adamsberg en pleine activité méditative déambulatoire. Se laisser porter par les visages croisés, les paroles vécues. Humer le goût de la vie. Ou encore emménager l'espace d'un instant avec trois historiens: un de la préhistoire, l'autre du Moyen-âge et le dernier de la première guerre mondiale. Se laisser porter par les silex à reconstituer, les inventaires de manoir. Sentir l'odeur du gratin qui sort du four.

Où? A Paris, dans le Mercantour, au Canada, en Bretagne, en Normandie ou ailleurs, c'est entre les lignes que vous aurez pignon sur rues agitées par un crieur de nouvelles noires, sur bistrots bondés, sur rivière aussi large qu'un fleuve. Et parfois au creux du décor se cachent des pépites, juste quelques mots qui vous donnent envie de convertir votre énergie en douceur, en curiosité, ou en tout autre chose... Ce fameux "je ne sais pas" Adamsberguien!

Un petit conseil: lisez les romans de Fred Vargas dans l'ordre de parution, vous ne regreterez aucunes de vos périgrinations, et vous aurez à chaque virage des vues superbes!