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11 septembre 2019
A la ligne
Il y a des livres salvateurs. C'est ce que fut pour moi A la ligne de Joseph Ponthus la semaine dernière, entre deux stations de métro dans une ligne blindée, inhumaine.
Dans ce premier roman, un ancien khâgneux passionné de littérature y décortique les non-sens du travail, depuis son expérience d'intérimaire dans l'agro-alimentaire à faire cuire des tonnes de bulots à celle du nettoyage et autres missions hard core dans un abattoir.
Il décrit le travail, les gestes, les ambiances, les silences et les bruits, les pauses, les douleurs du corps et de l'âme, les jeux de rapport de forces. C'est à la fois sociologique, poétique, et auto-fictif! C'est bourré d'anecdotes qu'on n'oublie pas. C'est touchant, révoltant, intrigant. Tout à la fois.
Il décrit très bien "le merdique", comme l'appelle le philosophe Pascal Chabot. C'est à dire les choses usantes qui ne produisent rien mais perdurent pour le plus grand malheur de certains. Et avouons le, on n'y passe tous! Qu'il est bon de voir des humains qui ont su inventer des postures pour tenir face à lui...
C'est un livre qui permet de prendre du recul sur nos univers professionnels. Un texte qui montre comment la littérature peut permettre de survivre, de Dumas à Apollinaire, en passant par la chanson française...
La forme du livre m'a plu aussi, comme une sorte de grand poème, de petites phrases courtes, puis à la ligne, justement. On sent qu'il écrit tous les soirs après le travail, pour évacuer, pour coucher sur le papier ce qu'il a composé au fil des heures pour ne pas souffrir ou s'ennuyer. On sent le vécu, le témoignage, l'immersion, la plongée, les oscillations de l'état d'esprit, la joie d'une bonne blague, la douleur d'un petit retard dans la chaîne.
Un livre à mettre dans toutes les mains pour dénoncer les accidents du travail, la précarité, le parcours des chômeurs, la condition ouvrière. Ce n'est pas de la haine, c'est une forme de regard juste, drôle, qui s'attache à tout pour tenir, tenir à tout prix.
Un livre où l'on sent l'amour aussi à la mère, à l'épouse, aux lignes qu'on se répète comme des mantras précieux,
Alors merci Joseph Ponthus, et chapeau bas. Un livre qui donne envie d'écrire!
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