13 juin 2013

Mondes parallèles



Et un petit Murakami pour la route: Les amants du Spoutnik.

Le héro K. est très ami avec Sumire, une fille hors du système qui tente en vain d'écrire des romans.

"L'esprit de Sumire était aussi clair qu'un ciel nocturne en hiver. La grande Ourse et l'étoile Polaire brillaient, bien à leur place. Elle avait un tas de choses à écrire. Un tas de choses à dire. Il suffisait qu'elle ouvre la vanne appropriée, et courant d'idées et de pensées pleines de passion jaillirait comme une lave incandescente, jusqu'à former une œuvre novatrice."

Alors que K. aimerait conclure avec Sumire, celle-ci tombe éperdument amoureuse de Miu, une femme d'affaire mystérieuse, lors d'un banquet de mariage. Dans l'espoir de passer plus de temps avec elle, elle accepte de devenir son assistante et de l'accompagner dans ces périples en Europe. Mais un jour, K. apprend par Miu que Sumire a disparu, et tout bascule.

Un roman troublant à la Murakami, avec tout ce qu'il faut d'amour, de désir, de doute, de quête... avec aussi la Lune, des mises en abime, et des questions existentielles.

Un roman sur la solitude, sur le manque et sur le désir d'écrire.

"Pourquoi sommes-nous si seuls? me demandais-je. Pourquoi est-il nécessaire que nous soyons si seuls? Tant de gens vivent dans ce monde en attendant quelque chose les uns des autres, et ils sont néanmoins contraints à rester irrémédiablement coupés des autres. Cette planète continue-t-elle de tourner uniquement pour nourrir la solitude des homes qui la peuplent?
Allongé à plat dos sur ma pierre, je songeais aux innombrables satellites qui faisaient en ce moment même des circonvolutions autour de la Terre. Une faible lueur soulignait encore l'horizon; cependant quelques étoiles apparaissaient déjà dans le ciel qui avait pris une teinte violine."

Le réel et le rêve se cotoient. Le voyage est aussi fort intérieurement qu'extérieurement. Nous restons des inconnus à nous-mêmes et aux autres, même si nous tentons tant bien que mal d'échanger, de partager, de comprendre.

Un roman pour tous les amoureux du mystère de la vie et de l'écriture.

Un roman pour ceux qui aiment les grandes histoires d'amour impossible.

Un roman pour continuer de déguster la subtile écriture poétique de Murakami!


08 juin 2013

Un petit coin d'Irlande



Si vous avez envie de revenir au temps des fermes, où les heures étaient ponctuées par les poules à nourrir, la lessive à faire à la main, le pain à faire à la main, etc, ce roman est pour vous: Annie Dunne de S. Barry. Vous retrouverez les années 1950, quand toutes les tâches étaient faites à la maison, sans assistance de l'électroménager, sans téléviseur, sans smartphone!

S. Barry nous emmène au fin fond du Kelsha, une région rurale de l'Irlande. Annie Dunne, son personnage principale est une vieille célibataire bossue qui vit avec sa cousine Sarah. Toutes deux ont un quotidien très routinier et intense en travail des campagnes, quand on vient leur confier la garde de deux enfants. Annie Dunne s'interroge alors sur le sens de son existence, sur la solitude, et sur ce qui fait le bonheur au quotidien.

Un roman qui coupe de la vie urbaine.

"Tout est propre et majestueux, le gros galet d'eau dans sa couronne de longues herbes, la pierre pour se mettre à genoux, sèche et accueillante. Je plonge mon seau avec une secrète adresse, pas une trace de boue ne remonte du fond noir. Le seau boit l'eau."

Un roman sur le rapport entre générations, et sur les rapports homme-femme dans les campagnes irlandaises.

Une jolie écriture aussi, qui donne à sentir la mousse, à entendre le bruit des feuillages et du vent!

"Je suis debout sous les étoiles et je rumine comme si j'étais aussi un animal, un être de plus dans la plénitude du monde. Je sais que je ne suis rien. Ma fierté ne s'appuie pas sur ma propre machine, elle n'est qu'un appentis construit sur un préjugé et s'appuyant sur la colère."




02 juin 2013

Petit coeur sensible au bord d'une falaise



Après Les Déferlantes, je viens de lire un deuxième roman de Claudie Gallay: Les années cerises.

Comme toujours, on sent toute la tendresse que Claudie Gally a pour ses personnages. Cette fois-ci le héros a une dizaine d'année... Il va à l'école où tout le monde le surmomme l'Anéanti, car il a du mal à suivre en classe, il est un peu en marge. Et ce n'est pas M. Pilou, son instituteur, qui l'aide à s'en sortir. Tout juste l'envoie-t-il chez un psy, en désespoir de cause et sans ménagement...

Il faut dire que notre bout de chou n'est pas aidé, car à la maison, sa mère ne s'exprime presque qu'avec des paires de claques. Et l'affection est un mot exclue de son vocabulaire. Quant à son père, on le sent absent. D'ailleurs le foyer s'effondre au sens propre, puisque l'érosion de la falaise fait que le terrain diminue à grand pas. Un jour, on se doute que la maison y passera, ainsi que le cerisier d'en face.

Heureusement, il reste de beaux échappatoires: la ferme des grands parents, les parties de pêche, et la jolie grande soeur de Paulo...

"Je suis puni.
Puni de tout, de stade, de dessert, de télé.
Le soir, je vais au lit à huit heures et je regarde le poster de la montagne.
La montagne, ils ne peuvent pas me l'enlever. Je l'ai dans la tête. J'ai que ça même. C'est là bas que je veux aller. J'arrive pas à expliquer. Pour tout dire, comme idée, c'est encore plus fort que la sœur de Paulo."

Un roman écrit à hauteur d'enfants.Une petite écriture fluide qui se lit toute seule. Avec simplicité et vérité, celle qui sort de la bouche des enfants, justement!

On s'attache très vite à ce petit gamin perdu, qui tente de se frayer un chemin dans la vie.

Merci à Sophie de m'avoir fait découvrir Claudie Gallay!
On en redemande!

Un roman facile à lire, et au ton juste.

Une petit cerise sucrée, mais pas trop quand même, tombée d'un arbre frêle.