06 janvier 2019

François, portrait d'un absent



Au décès de sa mère, Roland Barthes avait cherché le neutre, sous toutes ses formes, jusqu'à en faire un cours au Collège de France, que j'ai eu un immense plaisir à écouter il y a des années en MP3. Michael Ferrier, à la mort de François, a cherché le blanc, celui du deuil, des paysages de neige, des trous de mémoire qui se comblent. Un blanc très multiple, très profond, et très fuyant.

François meurt avec sa fille, Bahia, en mer, un tout début janvier. Et c'est la douleur et les mots pour tenir qui ont suivi pour Michael Ferrier que ces 235 pages.

François, portrait d'un absent est un livre plein de souvenirs à deux, un livre riche de fulgurances, comme autant de bons mots qui percent dans la nuit, quand on n'arrive plus à dormir. C'est un livre qui donne envie de faire attention aux détails, qui donne envie d'érudition, de bons alcools et de joies partagées.

C'est un portrait précis, comme semblait l'être François, qui connaissait si bien les différentes particularités d'interprétations de certains artistes comme ceux de jazz ou de musique classique. J'ai aimé apprendre le petit geste de la main de Leonhardt en fin de morceau au clavecin comme pour faire durer le silence magique qui clôt l'interprétation. Je trouve qu'on sent de ce silence-là dans les mots de Michael Ferrier.

C'est un livre qui donne envie de se replonger dans Montaigne ou de revoir les grands classiques au cinéma. C'est un texte qui donne aussi une forte envie de découvrir les documentaires de François, et pour ma part, j'espère trouver bien vite ceux sur le Sénégal.

Moi qui est fait mon hypokhâgne et ma khâgne à Lakanal, j'y ai été si surprise d'y retrouver des images de là-bas - Michael et François y ont fait leur prépa littéraire eux aussi.  Mais à l'inverse d'eux, je n'avais jamais fait attention aux types d'arbres qui étaient dans le parc. Cela me donne envie d'y retourner que pour ça. J'aimerais aussi voir un Liquidambar un jour pour de vrai, arbre qui a été plantée en souvenir de Bahia...

Il y a de nombreuses pages qu'on n’oublie pas, dont la 144 qui reprend des principes d'errance en ville que j'aimerais bien un jour tester.

"Straight, no chaser", c'est aussi ce qui caractérise la plume de Michael Ferrier ici.  La vie à l'état pur.

J'aurais aimé trouver à la fin la filmographie de François ou encore une liste des meilleurs ouvrages/films que François et Michaël ont vu ensemble, un peu comme à la fin de la BD Les Ignorants avec la liste des BD et vins partagés. A ajouter pour une prochaine édition!

Un grand merci à Christine pour le conseil de lecture!








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