17 mars 2009

Petites et grandes foulées




Courir
de Jean Echenoz se lit comme on écoute un journaliste sportif haletant commenter les exploits des marathoniens. C'est très factuel, et pourtant on se laisse prendre, on veut savoir si Emile arrivera premier, s'il battra un nouveau record, s'il décrochera une médaille. On sert les dents et l'on tremble pour lui.

Emile, c'est Emile Zatopek bien sûr. Célèbre courreur vainqueur du 10.000 mètres en 1948. Mais l'on découvre bien plus que les courses, on se plonge dans l'envers du décors. Son travail chez Bata, si si... Sa façon bien à lui de se positionner par rapport au régime tchèque.

Courir est un roman écrit par un homme pour les hommes. C'est très narratif. Il n'y a que peu de places pour les sentiments. Son histoire d'amour avec Dana est presque aussi mécanique qu'une course.

Ce qui reste touchant pourtant, c'est qu'Emile n'a pas l'etoffe des héros. Il est simple, honnête, juste avec lui même. Il ne change pas sa méthode ou sa façon de courir en fonction des autres. Il suit son cap, par tous les temps.

Ce roman pourrait tout à fait être adapté au cinéma dans le courant actuel des biopic.

Ce qui frappe au niveau du style, c'est la répétition du prénom, comme dans un rapport circonstancié. Emile fait ceci. Emile fait cela. Emile encaisse.

Echenoz fait presque de l'écriture une course. Ponctuant la cadence.

En outre, on a l'impression qu'une autre course se joue en parallèle, celle des chars, qui avancent.

Etrange objet que ce roman, biographie romancée à la Ravel mais pas seulement. C'est comme si l'intensité de la course marquait les pages, le rythme, et le style.

Avis aux amateurs de parcours biographiques en roman, mais aussi à ceux qui aiment les romans mêlant les histoires singulières à l'histoire des sociétés.

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