06 novembre 2008

Reflet dans l'eau...


Eau sauvage de Valérie Mréjen. Une eau fraîche dans laquelle il fait bon se regarder ou jeter quelques cailloux.



Au début on goûte du bout des lèvres ces lignes écrites comme des bribes de conversations entendues dans la rue. Des mots clichés mais qui font sourire lorsqu'ils sont défaits de leur contexte.



Et puis on ne peut s'empêcher de voir dans ces ronds dans l'eau qui s'affichent et s'effacent des pointes de burlesque des situations quotidiennes.



"Allô, tout va bien ma chérie? Non parce que j'ai vu ce matin dans le journal qu'un immeuble a brûlé dans le XIe et comme tu es dans le XIIe j'ai pensé à toi en me disant que c'était peut-être chez toi."



Petit à petit, on devine des extraits enregistrés des paroles d'une mère, ah non d'un père. Et puis on découvre son âge 71 ans, ses promenades dans les bois, ses attentions parfois trop envahissantes par rapport à ses filles,... Un roman qui laisse la part à l'imagination, puis qui se construit tout en négatif. Tout est dans le silence d'en face, tout est dans les réceptions possibles de ces phrases perdues mais liées les une aux autres.



"Je l'ai aperçue à l'enterrement de mon cousin, de loin ouh là... j'ai fait semblant de ne pas la voir."



"Allô il est 8h moins cinq, je suis déjà au restaurant, je pense que tu es en chemin, je t'attends, à tout de suite"



Très beau style parlé. Des messages laissés sur un portable, des réflexions qui donnent lieu à des figures limpides derrière ses tâches impressionnistes. Un roman hors norme de par sa forme: des suites de petits paragraphes qui sont autant de citations de ce père, et surtout entre eux les silences de la narratrice ou presque telle, une de ses filles sûrement.



Un livre qui se lit et se relit.



Un livre léger et doux.



Un livre amer parfois mais toujours une écriture subtile.



Un mot pour finir sur l'auteur. Née en 1969, Valérie Mréjen est romancière, mais aussi plasticienne et vidéaste. Je vous conseille d'aller faire un tour sur le site du Jeu de Paume pour en savoir d'avantage: c'est ici. (Le film vaut le détour)




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