05 janvier 2021

Personne ne sort les fusils



Sandra Lucbert, normallienne et agrégée de lettres, interroge la langue et le langage des dirigeants de France Télécom, lors du procès qui s'est tenu en 2019. Sept personnes sont sur le banc des accusés, pour maltraitance de salariés, et ce jusqu'aux suicides de certains d'entre eux.

Elle s'appuie sur les travaux des linguistes qui ont étudié les procès du nazisme, pour montrer comment par des glissements de mots, des terminologies managériales, on peut gommer le mal, bien qu'il existe.

Sandra Lucbert questionne la logique sociale, la logique économique, la logique psychologique et ce dans le choix des mots, la construction sociale du langage lors d'un plan de transformation en entreprise.

Parmi la cause des maux, il y a les mots. Ceux qui sont dits, ceux qui sont tus. Il y a les petites phrases et les grands discours et ce qu'ils révèlent de fonctionnement ou de dysfonctionnement organisationnel. 

C'est un coup de poing dans le ventre. Une piqure de rappel aussi, ce texte.

Comment nous faisons ou pas société passe par le language, les concepts, anciens et nouveaux. La langue nous construit, nous façonne, pour le meilleur et pour le pire.

Alors choisissons bien nos mots, ceux de la responsabilité, de l'éthique, de la critique.

Je trouve remarquable toutes les références que l'on sent en lisant Sandra Lucbert, notamment à Bauman et la liquidité de la modernité ravageuse. A Kafka, à Rabelais, Artaud et tant d'autres.

Un livre qui montre combien il est important de ne pas nous adapter à tout, qu'il est fondamental de décortiquer voire de déconstruire les concepts, les slogans, les titres, les indicateurs, et j'en passe. 

Merci à Marie pour ce précieux conseil.

Gardons les yeux ouverts.


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